vendredi 30 novembre 2012

Déserts - se préparer au voyage (Théodore Monod et Philippe Frey)


Un désert se définit comme une zone géographique très sèche où la végétation est quasi absente et le peuplement rarissime. J’ai eu au cours de mes voyages à parcourir brièvement trois types de désert. Dans le Grand Nord québécois, j’ai eu la chance de connaître le grand désert blanc de la toundra. Au sud de la Tunisie, j’ai vu le désert de sable du Sahara et enfin dans le centre-ouest des États-Unis, j’ai traversé le désert du Mohave pour joindre la Rive-Sud du Grand Canyon. La préparation d’un voyage comporte plusieurs actions à mener à des moments différents. La veille du départ, si la préparation de sa valise ou de son sac à dos requiert la plus grande précision afin d’en réduire au maximum le poids tout en s’assurant d’apporter l’essentiel, il existe un tout autre ordre de préparation soit celui de se documenter et surtout de s’imprégner de l’atmosphère des lieux que nous visiterons. Pour mieux comprendre le désert, je me suis inspiré des travaux et des voyages de deux éminents voyageurs du désert.

Théodore Monod
1902-2000 

Né en 1902 à Rouen, descendant d'une lignée de pasteurs, Théodore Monod était un naturaliste à la manière du XVIIIe siècle, zoologiste, botaniste, océanographe, savant passionné de l'Afrique, mais aussi humaniste généreux.

Sa famille s'étant installée à Paris, dans le 5e arrondissement, il fréquente dès le plus jeune âge le Jardin des plantes et le Muséum d'histoire naturelle. À la Sorbonne il obtient une licence de sciences naturelles. En 1920, il participe à une mission océanographique de deux mois consacrée à l'étude du milieu marin de la pointe de Penmarc'h (Bretagne). En 1921, il entame une thèse sur de minuscules crustacés vivant dans les estuaires.

En 1922, il s'embarque pour la Mauritanie, chargé par le Muséum d'étudier les ressources halieutiques de la côte. Se rendant à Dakar en suivant une caravane, il découvre le désert. En 1925, il est chargé de faire l'inventaire de la faune aquatique des fleuves du Cameroun. Il continue ensuite à parcourir l'Afrique du golfe de Guinée au Tchad. En 1927-1928, il participe à une grande expédition organisée par un riche Américain : la traversée du Sahara d'Alger à Dakar via Tamanrasset et Tombouctou. Désormais, Théodore Monod se consacrera à la collecte de plantes, d'insectes, de roches et de fossiles. À l'occasion il s'intéresse aussi à la préhistoire et à l'ethnologie. En 1928-1930, il fait son service militaire dans la compagnie saharienne du Hoggar. Il est déjà antimilitariste et pacifiste, il en profite pour étudier le massif de l'Ahnet.
De 1930 à 1934, Théodore vit à Paris où il s'est marié et a deux premiers enfants. En 1934, il organise une expédition en Mauritanie, dans la région de Chinguetti (Adrar), à la recherche d'une météorite localisée en 1916 par un capitaine d'infanterie coloniale. À la fin de sa vie, il se lancera, à nouveau et en vain, à la recherche de ce qui est considéré comme la plus grande météorite du monde. En 1936, il est dans le Tanezrouft dont il étudie la géologie. En 1938, il crée à Dakar l'IFAN (Institut français d'Afrique noire). Pendant la guerre, il est le correspondant de la France libre à Dakar où il accueille le général De Gaulle en janvier 1944.

En 1948-1954, il participe aux premières plongées en bathyscaphe du professeur Auguste Piccard (1884-1962). De 1956 à 1964, il parcourt le Sahara dans tous les sens. En 1965, il quitte définitivement Dakar.

Humaniste, Théodore Monod multiplie les engagements politiques. Durant la guerre d'Algérie, il signe le Manifeste des 121 pour le droit à l'insoumission et en 1966 fonde, avec Jean Rostand, le Mouvement contre l'arme atomique, dénonce l'alcool et le tabac, critique la chasse et les corridas. Dans les années 1970, il participe à l'aventure du Larzac et dans les années 1990 aux combats de l'association Droit au logement (DAL). En 1979 (et à nouveau en 1999), il figure sur la liste écologiste pour l'élection à l'Assemblée européenne.

Il continue à voyager : Iran, désert de Lout (1970), Égypte, désert libyque (une dizaine de fois dans les années 1980-1990). En 1993-1194, il effectue sa dernière méharée à dos de chameau dans le nord de la Mauritanie. En 1998, il effectue son dernier voyage dans le désert (Libye, Mauritanie). Il est mort à Versailles en 2000, à l'âge de 98 ans.






Philippe Frey est un spécialiste français des déserts et de leurs populations. Docteur en ethnologie, il enseigne également dans les universités de Strasbourg et Mulhouse. Il est l'auteur de nombreux ouvrages. Depuis de nombreuses années, Philippe Frey parcourt les déserts des cinq continents, à la rencontre des cultures nomades qui subsistent dans les territoires si hostiles à l’homme. Depuis trente ans, il a parcouru près de quarante mille kilomètres, à pied ou à dos de chameau, dans la fournaise, les vents de sable, surmontant la faim, la soif, l'épuisement, la solitude, et mille dangers. En devenant tour à tour chamelier saharien, chasseur-cueilleur en Afrique australe, Baloutche masqué en Orient ou en se faisant accepter par les tribus indiennes du Nouveau Monde, Philippe Frey a découvert des peuples et des cultures parmi les plus vieux du monde.

Ethnologue de la survie, il a pu ainsi étudier les capacités de l'homme à résister et à s'adapter au plus hostile des milieux. Aujourd'hui, après avoir vécu tant d'aventures, d'expériences, ressenti tant d'émotions, Philippe Frey, qui poursuit son exploration des déserts encore quatre mois par an, cherche à transmettre sa passion et ses découvertes. Il nous sert de guide dans ce voyage passionnant au coeur de la fournaise. Il est membre du Club des explorateurs fondé par Paul-Emile Victor.

De ses 40 000 km, parcourus seul, à pied, il a tiré un livre, 50° déserts brûlants qui a reçu le prix Jean Sainteny 2007 de l’Institut de France. Il nous emmène en Mauritanie, en Iran, en Inde, au Kalahari, à la découverte des peuples du désert. À l’occasion du lacement de son livre, il donne une entrevue à Canal Académie.