lundi 8 février 2016

Vers le Grand Sud

Nous n’avons pu publier notre chronique de voyage régulièrement ces dernières semaines, car nous étions dans la région du Grand Sud et les transmissions internet ne le permettaient pas. Nous nous étions laissés à Aglou-Plage à quelque quinze kilomètres de Tiznit en janvier dernier.

Aglou-Plage

Ancien village de pêcheurs, cette agglomération est devenue un centre de villégiature. Il subsiste toujours, malgré les catastrophes naturelles causées par la pluie, quelques troglodytes habités par des pêcheurs ou servant d’abris pour les équipements. Rien n’arrête les vagues déferlantes de l’Atlantique sur cette côte. C’est aussi une des portes d’entrée du parc national de Souss-Massa qui longe la mer depuis Agadir jusqu’à Tiznit au sud.

Sidi-Ifni

La route côtière entre Agloo et Sidi-Ifni est absolument magnifique. Partout nous observons les séquelles des grandes pluies de 2014 où les oueds gonflés à bloc ont tout emporté sur leur chemin vers la mer. Les routes et les ponceaux ont été reconstruits, mais de nombreux vestiges du passage destructeur des eaux de pluie sont toujours apparents. Singularité du climat marocain, depuis cette pluie catastrophe (plus de cinquante morts) c’est la sécheresse. Tous les oueds sont à sec et les agriculteurs se plaignent de la situation.

Guelmim

À Guelmim, nous arrivons à la porte du désert. Ici, tout change. Après avoir visité le grand souk du samedi matin où se transige les ventes d’animaux, dromadaires, agneaux, moutons venus d’aussi loin que la frontière mauritanienne. Nous en avons profité pour refaire nos provisions et nous installer dans un petit camping localisé au fond d’une vallée. Petit paradis vert entre deux montagnes de calcaire ocre où les oiseaux règnent en maître. Nous y rencontrons des personnes très intéressantes. En approchant du Sahara, nous constatons que le profil des campeurs change. Nous sommes passés des camping-caristes-vacanciers aux baroudeurs qui sont à l’aise qu’à l’extérieur des routes goudronnées et dans les régions les moins fréquentées par les Européens. Nous vous en reparlerons un peu plus loin dans ce billet.

Après quelques jours d’attente, les vents rendant la route du sud difficilement praticable pour notre camping-car, nous décidons de réserver la portion devant nous mener jusqu’à Tan-Tan pour un prochain voyage. Sur les conseils de nos nouvelles amies camping-caristes, Marie-Noëlle et Rose-Marie (les Marie), nous retournons vers Tiznit pour nous rendre dans la région du granit rouge à Tafraoute à l’est. Un paysage grandiose nous attendait au sortir du col nous donnant accès à la plaine vers Tiznit, au pied de l’Atlas. À perte de vue, depuis la route nationale sillonnant en flanc de montagne, nous observions la plaine fertile s’étendant entre mer et montagne.

Tafraoute

Depuis que nous avons quitté la région d’Agadir où se regroupe la majorité des Européens venant passer quelques mois d’hiver au soleil, nous découvrons un Maroc plus authentique. Tafraoute, située en territoire berbère, en est un exemple intéressant. Il faut fréquenter le souk pour y observer les locaux y effectuer leurs emplettes. La plupart des femmes étant vêtues de leurs magnifiques vêtements traditionnels arrivent de la montagne dans divers véhicules de fortune avec animaux et enfants et se rencontrent au centre du village dans un brouhaha parfois assourdissant. J’observe un conteur traditionnel qui est l’objet de l’attention d’une foule multicolore et bruyante qui s’esclaffe à chacune de ses phrases. Partout de petits ateliers de métiers traditionnels. Une spécialité du village, les babouches. Personne ne nous sollicite et chacun vaque à ses occupations. Nous nous sentons très bien dans cette atmosphère villageoise, et ce, contrairement aux villes touristiques où nous sommes constamment sollicités.

Après avoir passé le col d’Hordous à 1300 m selon notre GPS, les montagnes environnantes tournent au rose. Nous voilà au pays du granit rose. La ville de Tafraoute est insérée dans un cirque de rock dont la couleur varie selon le moment de la journée. Du lever du soleil à son coucher, ce spectacle naturel observé depuis la palmeraie où nous sommes installés pour la nuit est éblouissant. À l’origine, notre plan de voyage prévoyait la réalisation d’une boucle qui nous aurait ramenés à Agadir, sachant que la superbe route de montagne par laquelle nous nous étions rendus à Agadir n’était que le prélude à ce que nous devions voir sur la portion qui devait nous ramener à Agadir. Nous avions déjà eu des informations concernant l’état lamentable de cette route à la suite des dégâts occasionnés par des pluies abondantes,mais sur place «radio camping-car» nous a répété que la route était impraticable pour les camping-cars. Nous avons donc pris la décision de retourner sur nos pas vers Tiznit et de refaire la route à l’inverse, ce que nous avons apprécié puisque les points de vue étaient fort différents.

Évelyne et Chantal au souk
Quelques jours plus tard, nous recevions un «e-mail» de sympathiques connaissances rencontrées une semaine plus tôt, Évelyne et Jean-Pierre, qui se lisait ainsi : «Bonsoir, Sommes actuellement à Ouarzazate. Pas venus à Tiznit, montés à Taroudant par la r105. Avons mis quatre heures avec haltes. Photos magnifiques. Peu de kilomètres, pas plus difficiles que l'arrivée
sur Tafraoute. Ne pas trop écouter radio-camping car. Ce fut un plaisir de vous rencontrer. Amicalement. Jean Pierre et Évelyne. » Vous aurez compris que «Radio-camping-car», c’est la rumeur déformée par les appréhensions des camping-caristes rencontrés sur sa route. En voyage, la meilleure source d’information demeurera toujours son appréciation personnelle de la situation, tenant compte de ses propres limites et à la lumière de ses propres expériences. Espérons que nous pourrons refaire cette route un jour.

Parc National Souss-Massa

Autruche à cou rouge
De retour à Tiznit nous nous sommes arrêté à Sidi-Bibi afin de revoir nos amies les Marie et visiter les réserves animalières enclavées dans le Parc National Souss-Massa. Cette visite qui doit être effectuée à bord d’un véhicule 4x4 accompagné par un guide accrédité dure près de trois heures.
Oryx algazelle
Oryx
Addax
Ces réserves sont dédiées à la protection et à la réintroduction d’animaux ayant autrefois vécu dans le désert et maintenant en voie de disparition. C’est en toute libertés que des troupeaux de gazelles dorcas, d’Oryx algazelles, d’Addax, de gazelles dama Mohrr et d’autruches à cou rouge vivent dans ce parc. Nous avons pu les observer à loisir depuis notre véhicule dans leur milieu de vie protégé.

Taroudant

Il aura fallu revenir à Agadir pour rejoindre la ville de Taroudant. Son héritage historique est principalement marqué par une magnifique muraille crénelée encore en état. Cette ville élevée au centre d’une région d’orangeraies nous a semblé passablement provinciale. Son souk et son marché couvert sont particulièrement déroutants. Abstraction faite des cyclistes et de quelques marchands de gadgets électroniques, nous nous sommes sentis immergés dans une atmosphère des siècles passés avec la marchande de pain et son petit four de terre cuite, les ateliers enclavés dans de minuscules locaux construits en pisé et les trop nombreux passages voûtés contribuant à notre désorientation. Notre séjour dans cette ville s’est finalement terminé par un épisode de grands vents balayant la terre et la poussière dans la plaine longue de 125 kilomètres jusqu’à la mer.

Agadir

De retour à Agadir, nous avions rendez-vous avec nos amis québécois Paulette et Carol qui y sont en vacances pour quelques semaines. C’est avec beaucoup de plaisir que nous les avons retrouvés à bord de notre camping-car sur un stationnement en bordure de mer pour partager un repas.

Société

Au risque de me répéter, ce que j’apprécie le plus dans cette façon de voyager est l’occasion que nous avons de rencontrer des personnes exceptionnelles aux expériences de voyage hors du commun.

L'expression voyageur porte souvent à confusion. Qu'est-ce qu'un voyage pour vous?

J'ai beaucoup voyagé au cours de ma vie. J'ai fait des voyages d'affaires,touristiques,de farniente,gastronomique,de découverte. Des voyages imprévus, des tout compris, des planifiés, des improvisés, des surprenants, mais finalement, jamais de mauvais voyages. Quelle que soit la destination, la durée ou la raison, jamais je ne suis revenu à la maison sans avoir vu et appris quelque chose de nouveau, quelque chose ou quelqu'un à ajouter dans ma boîte à souvenirs. C'est ce goût de la découverte qui a fait de moi un "voyageur".

Si certaines aptitudes préalables semblent nécessaires à la profession, le métier de voyageur n'est pas nécessairement inné et requiert un long apprentissage. Tout comme un sport, plus on commence à le pratiquer à un jeune âge, meilleur on devient rapidement. Si à mon époque on commençait, pour toutes sortes de raisons, à voyager assez tard, il est remarquable de voir aujourd'hui des personnes dans la trentaine et même dans la vingtaine avoir déjà un bagage et une maturité de voyageur plus que surprenante.

Deux rencontres récentes nous ont confortées avec ce point de vue. Bruno, Français d’origine, voyage à bord de son 4 x 4 depuis 1998, Brittany, Canadienne du Nouveau-Brunswick, l’accompagne depuis quelques années. Ils ont voyagé sur tous les continents avec leur véhicule spécialement aménagé. Vous pouvez en savoir plus en consultant leur site internet en anglais. Nous avons également partagé un thé avec Annie et Pierre qui voyagent à bord de leur camping-car 4 x 4 depuis quelques années et qui prévoient traverser leur véhicule en Amérique afin de voyager de la Terre de Feu à l’Alaska. La philosophie de vie de ces personnes est très inspirante puisqu’elles ont troqué la course à la consommation au profit de leur liberté et ils semblent s’en porter très bien.

À très bientôt, Inch Allah!

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